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vendredi 4 juin 2010

Occuper son existence, ou comment lutter contre l'absurdité du monde ? (Comme si un simple article pouvait répondre à la question ...)


Coincés que nous sommes dans nos corps, à attendre qu'inexorablement la mort nous ouvre ses bras chaleureux, promesse d'un repos que l'on se plaît à croire éternel, il nous faut bien trouver quelque chose à faire en attendant. Enfin, c'est ce que je me dis …  Mais que faire ?
Si l'on y regarde de plus près, l'être humain n'a que peu de besoins réellement vitaux. Parmi eux on trouve : les voitures, l’argent et le football, ou encore les galas, l'alcool, la mode et les yachts.
Ou presque … 
Plus sérieusement, les véritables besoins de l'être humain, ceux sans la satisfaction desquels la vie devient bien plus qu’un ambitieux challenge à relever, sont : trouver de quoi manger, trouver un endroit ou dormir et, occasionnellement, trouver un partenaire afin de perpétuer son espèce. Le reste, bien que pouvant ne pas être superflu, n'est que le résultat d'une formidable aventure sociale qui débuta il y a des milliers d'années. Refaire l'historique de la construction sociale et anthropologique du monde n'est pas en rapport avec le fond de mon article et, quand même ça le serait, mes compétences en la matière (Néant !) ne me permettraient, tout au plus, que de dire de belles âneries.
Le reste, disais-je, ne relève que de la construction sociale (c'est l'hypothèse). Un jour, on a du voir que chasser à plusieurs permettait de ramener plus de gibier et on s'est donc allié. L'association des premiers humains a créé les prémices de la société. Une fois que les besoins les plus vitaux ont étés garantis (à la mesure de l'époque bien sûr !), l'homme a eu l'esprit libre pour penser à autre chose, pour faire autre chose. Pour plus de détails, demandez à Jean Jacques.
On peut imaginer que c'est au cours d'une nuit diluvienne qu'un jeune bipède qui appartenait à la grande famille des homo sapiens sapiens, rongé par l'ennui, tenta de dessiner sur les murs de sa grotte, parce que son ventre était plein et laissait donc sa tête en paix. Ce n'est bien sûr qu'une supposition, mais après tout, elle pourrait être valable… 
Et, des siècles plus tard, nous travaillons, nous avons la sécurité sociale, les impôts et, comble du luxe des pays occidentaux, des psychiatres chargés de nous faire aimer la vie, à nous, peuple pourri gâté qui ne sait même plus combien la vie peut être belle … Et tout ça, ce ne sont que des constructions sociales que les humains n’ont pu réaliser que parce qu'ils ont pallié leurs besoin les plus primaires. Tout ça, ce n'est, en somme, que le grand théâtre de la vie dans lequel l'adolescent se cherche un rôle et se sent mal dans sa peau au moment de monter sur cette scène de tragi-comédie. On appelle ça “la crise de l'adolescence”. Crise … en effet. C'est le moment ou le jeune humain, encore un peu enfant sur les bords, convaincu que la vie c'est quelque chose de magique, se rend petit à petit compte qu'il va devoir endosser un rôle, et ce pour le restant de ses jours afin de pouvoir s'intégrer au tissu social de son époque. Parfois on trouve un rôle qui nous convient bien pourtant. Parfois, la vie nous fait ce cadeau. “Vocation”, “passion”, ce cadeau peut avoir plusieurs noms. Il s'agit d'un amour inconsidéré pour une chose ou une autre. Un amour si fort qu'il permet de donner un vrai sens à sa vie, en dépit de tout le grotesque théâtre de l'absurde que l'humain s'est construit au fil du temps et dont il est maintenant irrémédiablement prisonnier. Oui, il s'agit d'amour. A y bien réfléchir, l'amour est l'une des seules choses qui ait un véritable pouvoir sur l’être humain. ‘Par amour, rien n'est impossible’, disait Diams. Bien que je ne verse pas spécialement dans le Rap et dans le RnB, je ne peux m’empêcher d’aller dans son sens et de lui donner raison.
Aimer permet de donner une réelle signification à sa vie. Pourquoi vivons-nous ? Parce que nous sommes le fruit d'un monstrueux hasard astrophysique, en premier lieu ; hasard qui, lui-même, s'est combiné à une très faible probabilité biologique d'apparition de vie sur une planète telle que la notre et ainsi de suite jusqu'à nous. Pas de destinées fantasques, pas de volonté divine, rien qu’un imbroglio de coïncidences aux probabilités infinitésimales, la pilule peut être dure à avaler …
Mais à cette question, nous répondons : Je vis pour quelque chose ou pour quelqu’un ; j'ai trouvé le sens de ma vie dans la relation privilégiée que j’entretiens avec cette entité —on change tout de suite de dimension. On ne subit plus le poids d’une existence absurde, mais on en prend les commandes, on se l’approprie, de la même manière que la Phèdre de Racine n’est pas tout à fait innocente, bien que maudite par Vénus. Et tout cela sans parler de la valeur marginale et presque négligeable d'avoir répondu à l'une des principales questions existentielles de l'humanité
 “Elles accouchent à cheval sur un tombe, le jour brille un instant et puis c'est la nuit …"
Samuel Beckett écrivait ces quelques mots, parmi tant d'autres, dans En attendant Godot. Et, si l'on regarde la vie humaine d'un point de vue odieusement déshumanisé et objectif, il n'a pas tord, le bougre ! Cependant, un tel point de vue est insoutenable pour les pauvres névrosés que nous sommes. On peut toutefois s'extraire de ce pessimisme noir en prenant le contrôle de sa vie, par l’amour ou la passion (encore une fois, pour un être ou pour une activité ; l’objet, finalement et paradoxalement, importe peu). On peut dire : “Certes, je vais mourir quoiqu’il advienne. Certes la vie n'est qu'un passage, et absurde encore ! Mais moi, pendant ce passage, j'aurais aimé, j'aurais vécu et j'aurais profité de ce formidable cadeau”. Dès lors, le monde apparaît sous un autre jour ! Un jour nouveau et plein de magie ! Car la vie, avant toute chose, c'est magique ! 
La solution consisterait donc à aimer. Quelque chose, quelqu'un, cela a peut d'importance : il faut aimer. Car l'amour défie la raison et, bien souvent, s'impose. Ce sentiment très fort permet de transfigurer la dure et froide réalité ; elle donne un cachet, un relief au monde. On peut être un humain insignifiant, un cadavre en devenir, mais parce que l’on aime et parce que, d’une manière ou d’une autre, cet amour nous est rendu, on passe outre cette funeste fatalité, on s’extrait de cette situation passive et larvaire et vivre en plein.


Telle est la théorie. A tout le moins, telle est la théorie qu'un pauvre être insignifiant, larvaire, condamné, etc … comme moi peut la voir. Deux problèmes se posent encore à ce stade de la réflexion. 
En premier lieu, que se passe-t-il si cet amour est trop “universel” ? J'entends par là : peut-on tenir la vie elle-même comme objet de cet amour ?
En second lieu, comment faire si l'on n'est pas passionné ?

 Si l'on aime la vie, au sens large, si l’on se contente simplement d’exister, alors tant mieux pour le temps que ça dure : on ne peut que difficilement vivre plus intensément. Cependant, la vie n'est pas rose, contrairement aux régions françaises. Et, tôt ou tard, la vie nous réserve un revers, une trahison, une grande déception, une défaite impromptue ou encore un autre de ses tours dont elle seule a le secret. Heureusement d'ailleurs car, sans avoir jamais fait l'expérience du malheur et de la douleur, on serait bien incapables de pleurer de joie et d'être conscients du bonheur lorsqu'il se présente à nous.
Celui qui aime la vie est donc certain d'être déçu, tôt ou tard. Aimer la vie est donc possible, mais ne semble pas représenter une « solution » viable et de long terme face au problème du vide de l’existence que l’on peut rencontrer car, lorsque cet amour est terni par les caprices de la vie, il ne reste plus rien …
"Si la vie m'a déçu, c'est qu'la vie ça déçoit …", chante Linda Lemay. Et que fait-on lorsque la blessure va jusqu’à entamer ce fameux amour pour la vie elle-même ? Si l’on n’a aucun autre penchant, aucun autre amour, alors on rejoint la seconde catégorie : on n'a plus/pas de passion. Ce qui nous amène donc à examiner ce second point.
Que faire alors ? Que faire pour trouver un sens à sa vie quand on n’a pas d’amour véritable ou de passion ?
Plusieurs réponses sont envisageables.
Dans un premier temps, on peut imaginer le cas d’une personne pour qui ce genre de raisonnement n'est rien d'autre que de la masturbation intellectuelle à tendance furieusement masochiste. Alors, le problème ne se pose plus : chercher le sens de la vie, ou se triturer les méninges à cause d’un vide originel, d’un mythe des origines et de la chute ne sert à rien à part à se trouer le moral. Il s’agit, pour cette personne, de savoir comment elle va faire pour sourire demain, ou plus prosaïquement, comment elle va se nourrir, et rideau.
Dans un second temps, qui arrive si on n'arrive pas à adopter le point de vue sus-cité, les choses prennent une mauvaise tournure. Car, si vous êtes un adepte de la réflexion inutile et automutilatrice, et si vous êtes sans passion, vos raisons de vivre sont réduites à néant. Et ce pour deux raisons. Tout d’abord parce que rien ne vous plaît assez pour occuper votre esprit tourmenté suffisamment de sorte qu’il cesse un instant de vous torturer par l’aporie dont vous êtes le produit. Et ensuite parce que la passion, ou l’amour, sont des sentiments tellement forts qu’en plus de vous distraire, ils peuvent altérer votre vision du monde, vous rendre heureux, ou vous donner une raison de vous battre, une cause à embrasser et qui relèguerai toute interrogation métaphysique à un rang plus que secondaire.

La solution semble donc résider dans le fait de pouvoir se découvrir une (nouvelle) passion. Seulement, à part prier le Saint Esprit afin qu'Il nous illumine (et dont on peut supposer la non existence —ou le sadisme- puisque nous sommes torturés et livrés à nous-même) ; ni la science ni ma grand-mère (dont les remèdes sont pourtant imparables d’ordinaire) n’ont trouvé comment tomber en amour.
Sand doute faut-il se bouger et aller à droite, à gauche, explorer d'autres domaines, rencontrer d'autres gens, faire d'autres expérience en espérant que, dans le lot, on arrive bien à se trouver une nouvelle passion. Si la chose peut sembler ardue, de prime abord, lorsqu’on y regarde de plus près, on s’aperçoit que bouger, rencontrer de nouvelles personnes, etc., c’est, peu ou proue, une définition du verbe vivre, au sens actif du terme. Car vivre sans faire toutes ces activités, faire du sur place, seul ou toujours entouré des mêmes têtes connues et, depuis le temps, honnies, se complaire dans la bouffissure du confinement et de la monomanie, ce n’est pas vraiment vivre. A peine est-ce survivre. Aucune fantaisie, pas de challenge, pas d’aventure, pas de palpitation, rien. C’est justement l’état apathie que l’on cherche à éviter.
Autrement dit : celui qui vit, celui qui ose, celui qui prend le risque de se tromper, de perdre ; celui-là trouvera une passion, un centre d’intérêt, un amour, une raison de continuer à exister en dépit de l’absurdité du monde. Inversement, ce n’est pas en s’emmurant, en se coupant du monde, en s’engonçant dans une routine exclusive du reste de l’humanité que l’on peut espérer être transcendé par une ardeur soudaine et impérieuse. Si nous sommes bel et bien coincés dans nos corps jusqu’à notre mort, nous ne sommes pas coincés dans nos vies (même si, dans la réalité, on se trouve des tas de raisons et d’impératifs catégoriques qui nous enchaînent). Et c’est en prenant des risques, en osant, en faisant, que l’on peut espérer outrepasser cette angoisse primaire qui est celle des origines et du sens du monde, par l’amour ou l’attention que l’on portera à un quelconque objet.

De toutes les manières, on connaît déjà la réponse, c’est 42.

Marcel Shagi

2 commentaires:

  1. Merci infiniment Marcel Shagi de m'avoir ouvert les yeux !
    J'ai beaucoup apprécié votre précieuse analyse ...
    Se trouver une passion et aimer,tels sont les clefs d'une vie paisible à laquelle l'être humain aspire ;merci de nous les avoir indiquées gratuitement.
    Bon courage.

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  2. Merci beaucoup pour vos encouragements !
    Cela dit, n'y allez-vous pas un peu fort ? Il ne s'agit là que d'un petit texte sans prétentions. Peut-il vraiment ouvrir les yeux de quiconque ?
    Je suis dans tous les cas ravi qu'il ait su vous plaire, et vous remercie infiniment de nous suivre et de nous donner votre sentiment sur nos articles.

    Bonne continuation à vous,
    J'espère vous revoir ici bientôt.

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